Suicide
Cadavre A
Ils l’ont portée à l’intérieur, fin cocon
Éclaté,
Avec un petit corps meurtri comme
Une lune étonnée ;
Et toutes les subtiles symphonies siennes
Un air crépusculaire.
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Suicide
Corpse A
They brought her in, a shattered small
Cocoon,
With a little bruised body like
A startled moon;
And all the subtle symphonies of her
A twilight tune.
*
Le Cadavre florissant
Si calme elle repose dans ce lieu clos, à l’écart,
Ses pieds devenus fragiles pour le rendez-vous spectral ;
Son pouls ne bat plus à son poignet,
Et son écho ne se perd plus dans son cœur.
Sur le corps et la tête paisible
Comme des somptueuses fougères au-dessus d’une tombe austère,
Ondulent ses cheveux soyeux et fleurissent sous ses aisselles
Les passiflores somnolentes des morts.
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The Florwering Corpse
So still she lies in this closed place apart,
Her feet grown fragile for the ghostly tryst;
Her pulse no longer striking in her wrist,
Nor does its echo wander through her heart.
Over the body and the quiet head
Like stately ferns above an austere tomb,
Soft hairs blow; and beneath her armpits bloom
The drowsy passion flowers of the dead.
*
Lignes pour une dame
Dépose-la sur l’herbe rousse
Avec ses yeux lourds et aveugles et usés ;
Ses deux mains croisées sur sa poitrine
L’une sur l’autre.
Étends-la dans la soirée blême,
Avec ses larmes soudaines et ses bouleaux blancs ;
Et laisse sa disparition paraître
Une chose facile.
Sors-la de cette heure de peine,
Et, d’un jet de terre sur elle, comme d’un souffle,
couds-la tendrement, pour qu’elle puisse-
Récolter sa mort !
Et ferme-lui les yeux, ferme-lui les lèvres,
Car paisible, trop paisible est sa langue épuisée ;
Son temps est terminé, son souffle s’est enfui
Et son chant est chanté.
Laisse-la sous l’herbe rouge sauvage
Dans les champs que remue la mort et que courbe la pluie
Et laisse son silence paraître se mouvoir
Au cœur de la semence.
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Lines for a lady
Lay her under the rusty grass,
With her two eyes heavy and blind and done;
Her two hands crossed beneath her breast
One on one.
Lay her out in the paling eve,
With its sudden tears and white birch-trees;
And let her passing seem to be
One with ease.
Close her out of this hour of grief,
And casting the earth on her, like a breath,
Sew her tenderly, that she may-
Reap her death!
And close her eyes, close, close her lips,
For still, too still is her smitten tongue;
Her hour’s over, her breath has passed,
And her song is sung.
Lay her under the wild red grass
In the fields death-tossed and bowed with rain;
And let her silence seem to move
Within the grain.
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Paradis
J’ai passé cette nuit une heure au Paradis ;
J’y ai trouvé une plume du Coq
qui Chanta –
J’ai entendu l’écho du Baiser qui Tua,
Et dans le noir, autour d’anciennes agonies
Bourdonner de petites mouches.
//
Paradise
This night I’ve been one hour in Paradise ;
There found a feather from the Cock
that Crew-
there heard the echo of the Kiss that Slew,
And in the dark, about past agonies
Hummed little flies.
Poèmes extraits de The Book of Repulsive Women (1915), Anthology of Magazine Verse (1918) et A Book (1923).
Textes © Djuna Barnes (trad. inédite © Raymond Farina) – Illustrations © DR
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