Au-Revoir Là-Haut (2017), absolument sidérant, au vu de son accueil critique et de son succès aux Césars, de nullité. Alors, oui, l’ambition, le désir de cinéma d’Albert Dupontel, sont admirables : mais, sous prétexte que le cinéma français est médiocre, il apparaît qu’on devrait considérer celui-ci comme un petit enfant et se montrer d’une extrême indulgence face à ses propositions. Or, non : c’est nul !
C’est visuellement grotesque et bourré d’enluminures, propre à ce que Jeunet et Caro peuvent proposer de pire… Et scénaristiquement, c’est une catastrophe absolue. C’est un produit typique de ce que l’on pourrait appeler la fantaisie, c’est-à-dire l’œuvre pratiquée au hasard, pour faire comme si : rien de divin, rien de pur, rien d’essentiel. C’est l’art comme un jeu, bien au-delà du mythe et de sa source.
Bref, le héros est le héros, mais cela aurait pu être quelqu’un d’autre (il n’est pas défini, il n’a aucune singularité, et l’histoire ne tourne même pas autour de lui) ; le personnage du dessinateur est une incarnation même du principe de la sensiblerie, caricature de l’artiste sensible et dépressif (bien sûr, il porte des masques d’oiseaux et s’exprime à travers une enfant, sa meilleure amie : on se croirait dans un mauvais pastiche de Jean Cocteau) ; le militaire très méchant joué par Laurent Lafitte est, on l’a dit, très méchant (et puis bête en plus, et faible, sans aucune profondeur ou vérité dans le mal ; c’est juste un bouffon digne d’un mauvais dessin-animé pour enfant).
Et à partir de tout cela, l’intrigue se déroule n’importe comment, non seulement sans la limpidité de l’allégorie (qu’est-ce que le film dit ? Rien. De quoi parle-t-il ? Toujours rien), mais – et c’est le pire – sans même la crédibilité d’une narration (toute l’histoire est due à des hasards invraisemblables, avec ce militaire qui tue devant le héros des soldats dans le dos, jusqu’à ce même militaire qui aide le héros à dissimuler la non-mort du peintre, jusqu’au fait que ce même militaire ensuite se marie avec la sœur du peintre (!), jusqu’à – et là, on n’en peut plus – que le père du peintre achète sans le savoir l’une des œuvres du fils (!!), et que le père engage le militaire pour le tuer sans que tous deux sachent de qui il s’agit (!!!) : non mais de qui se moque-t-on ?).
Cela a donc tous les défauts possibles et imaginables : c’est exagérément direct en terme de narration (tous les hasards du monde mis au profit du déploiement de l’histoire) sans pour autant être direct en terme d’allégorie (ça ne dit rien). À la fin, vraiment, on est atterré, lorsque le peintre saute du balcon : on l’avait vu venir depuis cinq minutes (il est sur un balcon et il porte un masque d’oiseau, duh) et l’on pleure, tant c’est bête et vide.
Diable : ça ne va pas mieux dans le cinéma français. Si l’on ne met pas zéro, c’est vraiment pour Dupontel, qui de toute évidence y croit, ne ment pas et déploie toute son énergie. Mais pour quoi ? C’est bien la triste question…
Note : 0,5/5.
Texte © Léo Strintz – Illustrations © DR
Face au Spectacle un workshop d’analyse filmique et sérielle in progress de Léo Strintz.
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