270 – À même telle estrade, et en arrière, sur le tableau noir, crayonnée, une phrase, il se saura — d’un titre prêté à l’actuelle séance ; qu’on se figurera déconnecté d’Encore (c’en serait le post-scriptum, ce qui vient après l’écriture, écriture encore si ce n’est que modifiée*, une relation est recherchée, à supposer que seule, saurait apparaître, est dite n’apparaissant pas, il ne serait pas temps déjà). En filigranes d’un tel titre, le contexte à grande échelle* des fragments à venir — ce qu’est devenue la Terre ou en tout cas ce qu’elle devient, précipitée vers l’abîme, les signaux n’y sont pas tout à fait encore, de ce qui se dégrade partout, etc.
De côté : Telles traces éparses d’une vie qu’il y eut, exposées encore mais pour plus un regard,
Le titre de la séance : Pour une littérature de haute intensité, plutôt que la guerre. Ceci, déclinable au pluriel dans les actuels brouillons, plus d’une littérature, plus d’une guerre,
La littérature — pléthore de langues, d’idiomes —, comme la paix, rivale de l’anéantissement avec les guerres, rivale du néant, pas inférieure [par ruades, ou alors un certain calme — selon. Autre heure, la séance ainsi aurait commencé : de combien de temps dispose qui parle ? (Question de celles posées à la Terre s’agissant du temps qu’il lui resterait, et en l’attente d’une réponse susceptible de ne jamais venir, car parle-t-elle ou plutôt serait-ce traduisible, sa réponse, répondant ; sa langue n’est-elle pas la plus impossible d’entre toutes ? Ne répondant pas, ce serait : de n’en rien savoir ou alors de le simuler, tout ne se passe ici qu’à sa surface, à même son écorce, il y aurait savoir en son intériorité seule, forant, sondant son noyau s’il n’est pas l’intouchable même (sacred core), n’est-ce pas cependant ce que permet une littérature, à supposer que s’y employant, s’élance d’une décision,
Plutôt que la guerre. Et abandonner à qui le voudra l’image ayant fait son temps de guerre en littérature, qu’écrire serait essentiellement chose — art — de la guerre, qu’entrer en littérature serait, etc. L’expression « de haute intensité » certes y emprunte, emprunte au lexique guerrier, d’un détournement afin d’avancer tout autre chose : qu’il importe de se préparer à la littérature qui vient. Sachant que s’interpose depuis peu l’IA (ce qui a nom de ChatGPT — catastrophe pour qui, écrivant, n’a pas d’écriture, et en tirait gloire jusqu’alors,
Neuvième esquisse, et esquisse effacée : Se préparer à la littérature qui vient, quitte à ce qu’elle ne vienne que d’un seul, admettons quand bien même : plusieurs s’il y a le plusieurs, brainstorming serait ici la pensée — qu’il y ait partage des manuscrits à l’ère révolue des manuscrits mais partage, circulation, objections — prolepses —, adhésions, passages ; ainsi, que nul du dehors n’y croie plus (ce que peut une littérature, rivaliser d’intensités avec la guerre) tient lieu d’excitation à sa crête, croire — mais il s’agit d’autre chose — aurait fait son temps, éjecté au rang de naïveté plus possible — idéalisme (or elle inquiète, une telle naïveté inquiète qui vient et dit son inquiétude sans autre forme de procès, ne s’en explique pas s’entend, quant aux préparatifs : s’il y a alternative (binarité), rappelant la rivalité évoquée il y a un instant — la littérature ou la guerre*. À quoi il s’agirait de se préparer, les deux cas distinctement l’exigent. Avec sentiment d’une simplicité en présence, s’il n’en va pas plutôt d’un dilemme (cas de conscience étendu, qu’y a-t-il de plus évident, il y aurait inévidence,
Onzième esquisse, et esquisse effacée : Se préparer à la littérature qui vient, or comment se préparer, et qu’est-ce à dire, se préparer, sachant que ce qui vient est sans apparition encore, que rien ne s’en peut savoir ou laisser deviner, ne serait-ce qu’un contour fût-il indistinct, qu’une esquisse manquée de contour ; ce serait, précisément : se préparer dans l’impossibilité de se préparer, à cette impossibilité même, or elle vient, question de jours, d’heures peut-être même, et il s’agit de se tenir prêt, s’y étant préparé sans le pouvoir, qu’elle ne fuie pas entre les doigts, première phrase (fluide inqualifiable). Qui la prononcera, qu’il sache du reste ou non qu’il la prononcera n’est pas dit, ni même si elle sera reconnue, sitôt que prononcée si ce n’est qu’étrange, d’étrangeté telle qu’elle contraigne ultérieurement à un retour qu’était-ce, et où était-ce, recherche du lieu, lieu s’il y a lieu déplacé* s’il n’a pas fui comme cette première phrase et avec elle, afin de ne jamais reparaître — cruauté. Or arrive la deuxième, devient-elle aussitôt première ? Telle serait la crainte (qu’il lui arrive un sort identique,
Note n° 49 : Plutôt que la guerre, les guerres devenues l’horizon de la vie à même l’écorce*, horizon donné comme seule possibilité, et non, donc, la littérature. Ce dont la littérature ici est le nom, s’il est possible d’avancer ne serait-ce qu’un mot seul en son nom, car de quoi s’agit-il, s’agissant d’elle ? Il n’est pas dit qu’une définition s’en puisse donner (sauf d’impossibles généralités) celui qui a tâche de définir s’est retiré — d’un désistement au vu de l’insurmontable de la tâche : en effet, sitôt qu’il y a proposition, celle-ci se voit contredite, et aussitôt, d’un non, pas cela. En tout cas pas cela seulement, etc. Reprise : Plutôt que la guerre. Que, donc, la littérature se substitue à la guerre, substitution qu’elle pourrait, qu’elle seule peut en vérité, elle qui peut jusqu’à la fin de toute guerre, les fictions d’une telle fin, susceptibles d’en disséminer l’idée dans les esprits,
Note n° 54. La haute intensité en littérature, de la littérature qui vient — sa généalogie à retracer l’occasion apparue ; on dira : non, elle ne vient pas, où voyez-vous qu’elle vient ? (Non qu’inaudible, tel grondement d’un lointain, mais qui vous dit que c’est cela, que cela ne peut être qu’elle ?). La deuxième phrase* avancée pourra être quelconque ou tenue pour telle — mais graduellement s’intensifiant, nous allions mal lire ou alors parce que se produiraient d’elle d’autres états (autant d’étapes de ce qui s’écrit, d’un cours quelque chaotique qu’il apparaisse, presqu’est-ce là toute la clause), et le cinquième état inquiète, le sixième pour le préciser, l’inquiétude du cinquième n’était rien au vu de celle occasionnée par le neuvième, etc. Qui rapporte cela ? Et de qui le tient-il,
Note n° 57. La littérature qui vient, il n’est pas dit quand, ne vient pas seule, on la dit en voie d’être doublée, doublée par l’IA et l’autre littérature qu’on lui sait pouvoir générer, pourquoi autre, et en effet, peut-être ne lui est-elle pas distincte (produit de cette littérature même, de quelque zone mondiale qu’elle provienne, que pas un cerveau ne saurait incorporer et cela l’excède : dépassement et énervement, énervé d’être dépassé),
Scandale. Il n’est pas impensable que soit rendue possible, dans les années à venir (lointain pas si éloigné que cela d’ici, prenant tout écrivain de court), émanant de l’IA, une génération de textes à la manière de ; — exercices de style* si l’on veut, tel texte tel que l’eût écrit Flaubert, tel que l’eût écrit Proust, etc. (Ajoutons : un pastiche de pastiche sera-t-il un jour possible à une IA,
Note n° 61. Il y a qu’il n’y a pas à l’IA de corps, pour éprouver ce qui s’écrit (se génère), quoi dès lors de l’intensité ? Phrase qui ne sera pas impossible à une IA, peut-être l’enregistre-t-elle déjà, untel tenez qui refusera d’être doublé par une IA, en reviendra à l’âge de l’écriture manuscrite ou alors de la machine à écrire*, et échafaudera son œuvre, dans le silence, sans possibilité qu’elle soit captée, autre phrase captée sitôt qu’écrite, peut-être. Allons savoir. L’astérisque : Machine à écrire, n’est-ce pas l’autre nom de l’IA même (ChatGPT) ou l’une de ses facettes. Comment résister, s’il n’y a pas plus important, plus grave en l’actuelle époque, guerres se précisant, déjà précisées, et faisant rage. Cela n’est pas sûr, tout vient en manière d’ensemble impossible, avec intrications désarmant la/les politique/s mondiale/s — impuissance : IA, guerres, épuisement écologique (raréfaction des ressources vitales), etc. Le tableau désolerait s’il n’était rien à y opposer. Pause et reprise du souffle. Une IA peut-elle reprendre souffle, perdre souffle s’entend ? Et, inversant les rôles, peut-on se prendre pour une IA (enregistrant à sa place, notamment, s’il y a seulement place, évaluer s’il est possible, la place qu’il y a, dans les registres intérieurs) ? Question étrange, comme inhumaine, non un seul effet d’inhumanité. L’IA se modifiant, et se modifiant à tout instant, modifiera l’écriture humaine, préciser cependant qu’il n’y sera pas recouru ici, comment fait-on d’ailleurs ? (Il y a comme un ne pas vouloir savoir), dans cette séance particulière menée depuis deux jours ne sachant où elle achemine, quand elle s’essoufflera, perdra souffle,
Note n° 67. Ce qu’il y a à opposer, ce serait — à la désolation, donc : la littérature, et elle vient, cela n’est pas rêvé, de n’avoir cessé d’être durant des siècles, pas même à exhumer, puisqu’elle vient (tressage des temps), qu’une vie la fait venir qu’elle tire d’elle-même, pour venir ; qu’elle ne soit d’aucun poids au-devant des guerres notamment est le préjugé le plus destructible (empruntant une fois unique à son lexique) quelque enraciné qu’il soit, qui du reste l’avance sans honte (qui le hantera longtemps) ? N’est-ce pas précisément l’inverse ? La littérature sauvant de la veulerie de tuer — il y a abîme, entre —, d’abimer, de heurter jusqu’au socle terrestre même et notamment sa végétation (qu’écarte afin de s’avancer, une jeune fille sous ombrelle c’est l’été), de menacer d’anéantir toute présence de vie, de s’y employer réalisant ce faisant le plus piètre des rêves, etc.
Brouillon n° 7. Ce que l’IA ne pourra jamais, c’est l’antériorité de « sa » production à la production humaine, à dater en tout cas de son entrée dans l’arène scripturale ; elle vient après, sans doute pas en retard mais après, tout au plus ne saurait-elle prétendre à cette antériorité qu’à fausser les dates ou ne pas les préciser [c’était l’IA et le pillage, chose de la psychose,
Cela aura été évoqué dans la séance, et comme en passant, n’y pensant qu’à peine, la réticence à faire usage de l’IA — ChatGPT, ne serait-ce que pour voir. Réticence qui n’est pas se l’interdire, l’occasion saurait cependant ne jamais y être : demain, sans faute, essayer, chaque lendemain, demain, soit indéfiniment différer, d’un défaut de nécessité à ce qu’il semble, or parler de l’IA (ChatGPT) sans en avoir fait usage ? Une inquiétude règle encore le geste de différer, ce serait : ne sachant où elle entraînerait, faisant dévier le cours de la séance vers des abîmes, s’il serait autrement dit possible d’en revenir indemne, demain vient-il de se dire, chaque lendemain, demain, où se voit indéfiniment éconduite l’IA, donc. Dater l’indécision. 18 novembre 2024. Arrivera l’ère du soupçon étendu, et peut-être n’est-ce déjà plus un futur, nous y serions ; que tout texte* dont il y aurait lecture soit un produit de l’IA ou qu’il y ait eu recours par épisodes à l’IA. Qu’il s’avère après vérification (le comment de la vérification interroge, il est tôt encore) que non ; il y aura eu doute, possibilité du soupçon, forme accentuée du doute (et accentuation à dessein*), du fait d’un indiscernable. C’est ici le cas de textes dont les auteurs ne seraient pas connus ; s’ils l’étaient, nous nous figurerions savoir, etc. Ce qui d’ores et déjà intéresse, c’est la mise à l’épreuve, stimulante quelque redoutable qu’elle semble, de la lecture, et avec elle, de qui lit. Si — donc — il y a traits permettant le discernement, d’infinies recherches s’engageant, dussent-elles échouer (plutôt que la vie végétative). Quant à qui écrit, telle proposition — première à venir à l’esprit : que soit évitée toute phrase qui pourrait avoir été écrite par une IA (proposition retorse, engloutie déjà gageons — de telles phrases impossibles à l’IA seront peut-être premières à être englouties par elle, or qu’est-ce que cet engloutissement ? Que serait-il en l’absence de destinataires (d’usagers,
Le titre de la séance était, s’il importe seulement de le rappeler, il y aurait eu bifurcations : Pour une littérature, etc. Or la littérature ici n’est pas seule, une telle solitude serait façon de parler, ne le serait donc pas, seule et seule engagée dans la séance, entendre l’extension à tout domaine de ce qui a nom d’arts, de la peinture à la photographie en passant par la musique, etc. Non seule (un ensemble, l’ensemble qu’il importe d’avoir en tête), voici ce qui vient, et venant, voudrait abolir les velléités guerrières d’où qu’elles émanent, comme le peut une musique, cf. l’adage qu’elle adoucirait les mœurs, refoulant les pulsions meurtrières, il y a certes les cas de ce qui lui advient en dictatures, les interdictions, arrestations arbitraires, s’expliquer à des instances sourdes, l’emprisonnement en l’attente d’un changement de régime, etc.
Note n° 78. Il a été dit : « d’un cours quelque chaotique qu’il apparaisse », il y a des défauts à la séance, certains apparaissant à qui écrit que ce soit avec retards, s’employant dès lors à des retouches, éparsement, ajouts, effacements, reprises ; d’autres, sans visibilité, qu’un lecteur de passage signalera s’il y tient, contribuant à la vie de la séance, et séance strictement d’écriture ne simulant pas même qu’elle serait parlée, c’eût été : au-devant d’un auditoire dont l’attention constituerait toute la chance — d’un questionnaire intempestif fusant de toutes parts (petite foule en un amphithéâtre de province, toute parole enregistrée qui eût fait l’objet d’une diffusion sur les réseaux) ; séance strictement d’écriture, donc, telle que permettant les retouches évoquées — retours et plus attentivement relire, excroissances de phrases dans les marges, incises et digressions —, mais aussi un temps presque sans limite. Ou alors limite qui ne sera que d’avoir épuisé le propos, si cela se laisse figurer. Sera-t-il alors temps que l’IA vienne ajouter ? (Il y a d’une telle question comme un n’en pas revenir, qu’elle n’ait été écartée). Elle dont on dit* tout ce qu’il y a de défectueux la concernant — s’expérimentant encore, ou le in progress. Première hypothèse, en manière d’objection : L’IA (ChatGPT), ne fût-elle qu’écriture (artificielle, robotique), serait sans écriture*, à l’âge encore, du moins, d’en être dépourvue, et de le laisser paraître, perfectible en cela s’il se sait seulement ce que serait la perfection en la matière. Deuxième hypothèse, en manière d’objection : L’IA (ChatGPT),
Mais l’IA n’est pas l’objet de la séance, seule composante des temps actuels, telle cependant qu’elle vient affecter — et peut-être est-ce ne rien dire, affecter — ce qui a nom d’écriture, la littérature même ; à dater de son apparition virale, rivale importune ou alors sera-ce chance d’un possible sursaut, que la littérature ne s’oublie pas comme écriture avant toute chose. Qu’est-ce qu’un impair ? Que serait-ce ici que commettre un impair, la maladresse flanquant par terre la séance, et pourquoi cette pensée ? Le fragment est sans notes, rien ne le vient soutenir, sa phrase chercheuse, disant pause, que soit effectuée une pause, afin de chercher sans les dehors, l’apparence de chercher, alors en revient au titre, l’intensité, la haute intensité en littérature (silence) plutôt que la guerre. Il y a qu’il y a guerres, impossible qu’impossibles (impossibilité qu’il faudrait, impossibilité dans un autre monde) preuve en est qu’il y a et qu’elles font rage, éparses, à peu de distance d’ici avec l’étrécissement du terrestre, tout étant désormais à infime distance de tout, et l’expédition que c’était, il n’y a pas trois siècles, harassante, d’avoir à traverser l’Atlantique, s’effectue en de seules heures sans que ne se meuvent les corps. Il y a qu’il y a guerres, rien de nouveau, mais s’intensifiant avec l’étrécissement du terrestre, le mot d’intensité, en voie d’intensification plus encore, est un emprunt, il y a tout lieu de croire, emprunté lui-même, qui n’emprunte pas, voulant parler ou écrire ? Il y a qu’il y a guerres, il n’est pas dit cependant qu’une écriture ait forcément à les rapporter, que la littérature doive en faire sa cause, s’engageant contre,
Il y a pour la littérature d’autres contrées que — seul — le contre, quand bien même ne l’excluant pas, parce qu’il serait nécessaire, justifié d’être — tels cas —, plus d’une littérature (ou alors littérature protéiforme). Note : La séance saturée d’il y a — ce serait son objet, un instant, ce soir, ces il y a mêmes qu’il y a ; ce soir, ce quatrième soir, ou alors est-ce le cinquième, peu de soirs (récence de la séance, ne sachant ce qu’elle peut encore, ce qu’elle veut d’une progression comme à l’aveugle, à présent — se voyant ne pas voir, et peut-être cela l’effraie-t-il ; ou alors voyant ce qu’il y a d’invisible au regard, parce qu’il ferait nuit, brusquement la nuit serait tombée — l’invisible ? Où achemine le fragment, toute phrase s’avançant ici-même). L’il y a ? Et pour en finir avec l’actuelle note : un tic d’écriture, or s’il y était recouru encore, ce serait alors — en connaissance de cause, tant de fois, etc. Il a été dit : les autres contrées. À quoi il saurait être objecté l’imprécision — évasivement l’évasion*, les disant à l’occasion lointaines, qu’une expédition vers est à engager — qu’elle l’est déjà, et depuis des lustres : image de ce que serait l’écriture, réduisant à l’extrême son champ, sa physionomie, sa portée. C’est ainsi ici qu’échoue le fragment, échec relevé dans la séance, s’il peut s’en relever, comme s’il n’était pour la littérature que l’alternative seule et intenable, insoutenable : le contre (de l’engagement) ou l’évasion, et non, tel cas, alternativement l’un et l’autre. Mais ce mot d’évasion, semblant provenir des romans de gare, il y a vase en lui, le vaseux (bourbe, fange, etc.), d’autres sauraient lui être préférés dans la séance — situation d’attente — pour qualifier l’écriture, la lecture,
Note n° 79. Que serait un texte de haute intensité, lu par un robot ? L’intensité ne serait-elle pas neutralisée sur l’instant — appeler encore lecture sa lecture ? Par ailleurs, n’y a-t-il pas des lectures « robotiques » qui se puissent, humaines ? Parce que l’attention ferait défaut, la lecture robotique serait cette inattention même, encore qu’il n’y ait d’inattention qu’humaine, pas de robot inattentif, sauf à ce qu’il ait été programmé pour sembler l’être (ne « simule » pas même cela, ni ne dissimule, traits de l’esprit). Comme il sera programmé pour sembler à l’occasion spirituel — empruntant à ce qui relève, à ce qui se voit décrit comme mots d’esprit, ironie, etc. dans — notamment, et avec force exemples — les manuels d’école. Mais c’est en revenir à l’IA une fois encore, de la séance le spectre, objet d’inquiétude, d’étude aussitôt et voici l’inquiétude comme atténuée. Et dès lors vient s’y substituer, plus inquiétante, l’autre — de la guerre, susceptible de réduire à néant, d’anéantir la séance (néance, le mot existe déjà) ne tenant qu’à un fil, film précaire, il ne dépend que d’une frappe, que d’un missile venant frapper la zone où se tient la séance, et il n’est plus rien d’elle à espérer, plus une note. Plutôt que la guerre. C’est la formule, dans le titre, la littérature — opposée à la guerre, ce qu’elle peut, et elle peut, notamment, qu’il soit cessé d’y penser, ou en tout cas d’y penser sans cesse et plus que de raison (ce que peut la raison — mot de la philosophie plus que de la littérature ; au-devant précisément de ce qu’il y a d’irraisonnable dans le cerveau de qui provoque la guerre, et la fait se propager, des intérêts, soit, sont en jeu. S’ils justifient de tuer,
Pause d’une relecture des notes, le contexte en est ces temps-ci d’extensions des guerres en cours, d’intensifications, et sauf à ce que se rétracte la pensée sous d’impossibles carapaces, il s’énonce, telle voix, la nécessité plus que jamais de l’écriture, y a-t-il plans de ce qui s’écrira tout à l’heure, demain ? De ce qui s’écrit ici-même ? Pas un, la phrase est ainsi risquée, risque de se perdre, peut-être se perd-elle, est-elle à tout jamais perdue (cette pensée, suspendue), risquant de perdre des fils qui lui seraient précieux, apparus dans son expédition de nuit, c’est à présent la nuit, voici que tombe neigeuse la nuit, et que progresse donc la phrase mais vers quoi ?
Brouillon n° 13. Quelqu’un s’avance, vers l’estrade inventée, et dit ce qu’il dit, en sa langue, langue pas intraduisible, si elle n’est pas celle de la séance : « Je voudrais qu’un instant nous suspendions les guerres ». Mais une telle phrase n’est pas seule prononcée, et soit dit en passant, surtout, qu’elle ne déclenche pas un rire, un autre : « Plus qu’un instant, le temps de la séance ce soir. Ce qu’il se passerait. Toute guerre suspendue, s’éprouverait l’une des dernières fois ce que fut la vie douce et insouciante, sur ce socle particulier* qu’est la Terre, telle donc qu’il y en aurait mémoire, cette vie même ». Plus d’un intervient — saturant l’espace de l’estrade —, réactivant la séance alors au point mort, il y faudrait la fiction du point mort, de la progression impossible, afin qu’il y ait soudainement reprise (effet de reprise), élancement d’autres phrases, profusion, la profusion elle aussi fictive, étant entendu qu’en vérité s’amenuisent les phrases : « Suspension des guerres, la littérature peut cela, en rêver et écrire son rêve, plus qu’une suspension, qu’une trêve, même, tenez qu’est-ce que le faire abstraction, faire abstraction de,
Note n° 89. La guerre pour celui-là (qui vit à l’écart de tout, en une montagne d’altitude qu’on trouvera hautaine) tiendra lieu d’abstraction — mais en vérité, pas même cela ; qui n’a accès à aucun réseau d’informations mondiales — non que refusées ; ni aux images qui ailleurs, partout, s’en diffusent, où est-ce, y a-t-il terrestréité de telles images ? Est-ce la même Terre, se peut-il qu’il y ait plus d’une Terre ? Ce n’est pas ici en tout cas, ici est autre, tout autre (passage d’une brebis, reconnue en cela que venant régulièrement paître en ces parages, effectue une brève halte, infinie douceur de son regard, un ciel hivernal semble s’y miroiter). Intermède — quatrième brouillon. Si le mot guerre n’existait pas, en quelque langue que ce fût à même l’écorce*, qu’il était sans synonymes, même, cela n’annulerait-il pas la possibilité de toute guerre — comment en faire la déclaration ? — de tout ce qui y a trait ? Toute trace de violence (pas non plus ce mot), ou alors traces à ce point lointaines qu’incompréhensibles. Cela se pourra tout au plus après l’ère de l’Homo sapiens, semblant — nervosité des derniers temps — vouloir précipiter un tel après, dût-il ne jamais lui apparaître,
Note n° 97. Le monde, ainsi qu’il apparaît, tant de signaux, d’alertes, est en voie de finir, d’autre chose que de guerres (le socle terrestre épuisé, et pas lui seul, Terre dont le cœur saurait éclater, arrivé à échéance*, entendre : peut-être éclate-t-il en ce moment même, d’une propulsion dans le futur qui dès lors ne peut plus être), et, presque, pas d’autre proposition que cette accélération de la fin par la guerre. Presque. Etc. Ce qui peut être écrit, et, écrivant, ajouter, dans les profondeurs de la nuit, distante un instant des guerres, où nous serions (dans cette distance même d’un instant), où nous sommes, où celui qui y est dit nous sommes, nous dans le sommeil ou alors tout juste à son sortir, voudrait décrire son rêve mais il en est un autre de plus d’importance, ressouvenu le temps de l’éclair, une guerre-éclair, et guerre primitive, les missiles n’y étaient que pierres (transfiguration) catapultées imprécisément, et d’un impact irréel sur les cibles, irréalité des cibles elles-mêmes, irréalité de tout, de la raison même de la guerre, qu’il n’y en ait aucune, qu’elle soit l’aucune même, s’agit-il de s’en divertir, et est-ce tout à fait une guerre,
Brouillon n° 15. Des semaines passeraient sans écriture, où l’on aura cru voir finir la séance, finir ou nuance, se désagréger ainsi qu’il advient d’images oniriques, la séance serait rêvée [effacé : et avec ce rêve le monde même, comme s’il en allait là d’un désir, qu’il fût dit : qu’il finisse, d’un désaccord d’avec sa tournure récente — elliptiquement la phrase]. Des semaines passeraient sans écriture ; chassée de l’esprit, la séance (non qu’autre chose aurait lieu ailleurs), pour la seule inertie (à appeler gestation ? Quels en seraient les gestes ? Ceux de l’attablement encore ?). Mais c’est là tout l’irréel du fragment, que puisse être levée la séance, soit la sentence il est dit* prononcée en des temps immémoriaux : reconduction de séance (comme se reconduisent le jour la nuit dans le temps de vie), puisqu’il y a souffle encore, et battements cardiaques, pour l’écriture même, la séance. Alors ce qui y advient, telle chose, il n’est pas dit d’où cela, et ce peut être, d’au-dessus ou alors d’en-dessous suivant ce qui se préfère ; ni quoi, et ce peut être qu’interviendrait, depuis les gradins (de fictivement l’amphithéâtre), telle figure, dite figure parce que figure, mais non figurant, il a une question, et — il prévient — elle saurait désarmer qui jusqu’ici parlait fût-ce dépourvu de toute arme : est-ce bien figuré à présent qu’il vous faudra une autre écriture, voire autre chose qu’une écriture, pour succéder à la suite de séances ayant cours ici-même ?
Texte © Denis Ferdinande – Illustration © DR
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