Ayant entrepris d’écrire une description de la pierre, il s’empêtra. (Francis Ponge)
Dans un petit livre tardif (Pratiques d’écriture ou l’inachèvement perpétuel, Hermann, 1984), Ponge note ceci : « À partir du moment où l’on considère les mots (et les expressions verbales) comme une matière, il est très agréable de s’en occuper. Tout autant qu’il peut l’être pour un peintre de s’occuper des couleurs et des formes. Très plaisant d’en jouer. Et pourquoi n’y aurait-il pas un public, une clientèle pour goûter ces jeux ? Par ailleurs, c’est seulement (peut-être) à partir des propriétés particulières à la matière verbale que peuvent être exprimées certaines choses — ou plutôt les choses ». C’est là une façon de voir qui m’intéresse où perce une insolence, et des mots qui forcément me parlent. Je ne crois donc pas avoir extrapolé jusqu’à l’outrage la pensée de Ponge en traduisant son Parti pris des choses comme je l’ai fait, à savoir : vu comme un matériau — ou plutôt le matériau.
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Une traduction en V.U. (= Version Universelle et/ou Visuels Universels) est une dérive numérique engagée à partir d’un texte littéraire donné. Chaque page dudit texte est traitée comme une image, autrement dit d’un point de vue volontairement désinvolte au regard de la sémantique et de la narratologie. Cette traduction s’effectue selon un protocole dédié soigneusement élaboré en amont, chaque texte induisant un protocole spécifique. On ne saurait, en effet, traduire avec les mêmes clefs des auteurs aussi différents que Joyce, Ponge ou Gombrowicz ; de subtils distinguos sont nécessaires (tons, rythmes, nuances etc.). Voilà pour l’essentiel en quoi consiste ce travail de traducteur. Le dispositif mis en œuvre produit bel et bien une autre version du texte souche. Que cette nouvelle version semble illisible, ou à tout le moins assez difficile à déchiffrer, est une question purement académique. Il y a énigme là-dedans, bien sûr. D’une page à l’autre, cela ne s’éclaircit pas — ni ne s’obscurcit. La traduction flotte. Et tout le reste est poésie visuelle.
Texte & Illustrations © Daniel Cabanis
Traductions en V.U. est un workshop de poésie visuelle in progress de Daniel Cabanis.
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