À l’origine, j’avais l’intention de réactualiser la série Têtes (1992) de Patrick Tosani qui avait réalisé en gros plan, et vue du ciel, des photographies de la chevelure de différentes personnes. Réalisant à mon tour une vingtaine de prises de vue dans la même intention de représenter des chevelures d’autres personnes, donc d’une autre époque – 26 ans plus tard (2018) – celles-ci me sont alors apparues trop réalistes, mais surtout, trop esthétiques. Par la suite, le projet m’a quelque peu échappé car, voulant les travailler en post-production dans le but d’en révéler la nature plus métaphysique, plus archétypale, l’interprétation de ces images ainsi recodées les a fait ressortir de manière abstraite, presque absconde, produisant ainsi une lecture aberrante de celles-ci comme autant de déviations et d’errements propres à ces erreurs de codages et autres anomalies de transposition visuelle, affichant sur l’écran ces chevelures sous une forme labyrinthique et énigmatique comme s’il s’agissait de l’empreinte digitale de chaque tête, empreinte qui – au-delà de notre perception du visible – me dévoilait sciemment une autre dimension de ces êtres : leur autre moi.
La série Alter Ego appartient au projet Image manquante. Ce projet propose une construction photographique composée de 23 séries, elles-mêmes constituées de 23 images – la 23e représentant « l’image manquante » à la manière de la « lettre manquante » de l’alphabet hébraïque. La totalité des 529 photographies sont organisées sous la forme d’un « carré magique », sorte de vision révélée et révélatrice de notre époque, de ses crises, mais également, de ce que peut encore une image artistique. La 23e image de chacune des séries n’apparaîtra qu’à l’achèvement du projet.
Texte & Photographies © Isabelle Rozenbaum /ADAGP
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